La CPI enquête sur les crimes sexuels commis en Centrafrique en 2002 et 2003
Par AFP
La Cour pénale internationale (CPI) a annoncé mardi avoir ouvert pour la première fois une enquête sur des crimes sexuels, des viols en Centrafrique en 2002 et 2003, mais elle n'a pas nommé de suspect.
"C'est la première fois que le Procureur ouvre une enquête dans laquelle les allégations de crimes sexuels excèdent largement le nombre d'assassinats présumés", a précisé la CPI dans un communiqué.
"L'enquête ne vise aucun suspect en particulier à ce stade et sera guidée exclusivement par les preuves qui se feront jour", selon la CPI.
Plusieurs noms ont été cités dès 2004 par la justice centrafricaine, qui n'apparaissent pas dans les documents publiés mardi par la CPI, dont celui de l'ex-président Ange-Félix Patassé, du chef rebelle congolais Jean-Pierre Bemba, et de l'ex-gendarme français Paul Barril, qui avait organisé une garde rapprochée pour M. Patassé.
Le sénateur et ex-chef rebelle de RDC Jean-Pierre Bemba a nié mardi toute responsabilité dans des crimes commis à cette période en Centrafrique et affirmé qu'il avait à l'époque lui-même appelé l'ONU à une enquête, dans une déclaration à l'AFP.
"Je suis le premier à avoir demandé une enquête sur des allégations de viols et d'exactions qu'auraient pu commettre certains de mes hommes", a déclaré M. Bemba, joint par téléphone au Portugal, où il est actuellement en soins.
"Je n'ai jusqu'à aujourd'hui reçu aucune nouvelle des Nations unies, ni aucune preuve impliquant les troupes envoyées en Centrafrique en 2002", a-t-il précisé.
"Ma responsabilité est totalement dégagée dans cette affaire", a estimé M. Bemba, qui dirigeait à l'époque le MLC depuis Gbadolite (nord de l'Equateur). "Je n'étais pas en Centrafrique et si demain une enquête conclut à la responsabilité d'éléments du MLC, ils devront être poursuivis et condamnés comme le prévoit la loi", a-t-il ajouté.
Pour mater la rébellion, M. Patassé avait notamment fait appel au MLC de M. Bemba, dont un millier d'hommes ont participé aux combats contre les troupes du général Bozizé.
Une fois la tentative de coup d'Etat matée, les "Congolais" ont fait régner la terreur, tuant, pillant et surtout violant.
Aucun bilan officiel n'a été révélé. L'Organisation pour la compassion et le développement des familles en détresse (Ocodefad) centrafricaine a récemment affirmé avoir recensé un total de 1.045 victimes, dont 480 femmes et fillettes violées
La CPI dit avoir identifier "au moins 600 victimes". "Les allégations de crimes sexuels sont précises et étayées", a expliqué le procureur Luis Moreno-Ocampo, cité par le communiqué. "Les renseignements dont nous disposons laissent à penser que des viols ont été commis en des proportions telles qu'il est impossible de les ignorer au regard du droit international".
"Nous allons mener notre propre enquête de façon indépendante, rassembler des preuves et poursuivre les principaux responsables", a précisé le procureur.
"Aux fins de dissuader de futures violences et de promouvoir une paix durable dans la région, notre devoir est de montrer que nul ne peut commettre des crimes à grande échelle en toute impunité", a encore déclaré M. Moreno-Ocampo.
La CPI est fondée à intervenir car le gouvernement centrafricain avait déferré la situation au Procureur, et la Cour de cassation a en 2004 confirmé que le système judiciaire national était dans l'incapacité de mener les procédures complexes nécessaires à l'enquête et aux poursuites concernant les crimes présumés.
Selon le Statut de Rome, qui a créé la CPI, la Cour n'intervient que dans les situations dans lesquelles les autorités judiciaires nationales ne peuvent ou ne veulent engager des procédures véritables.
Il s'agit de la quatrième enquête de la CPI, après celles lancées en République démocratique du Congo, en Ouganda et au Darfour.
CongoOne , Mise en ligne le 22-05-07
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