dimanche 11 mars 2007

LIBEREZ MAITRE MARIE-THERESE NLANDU


Libérez Maître Marie-Thérèse Nlandu

Le 8 mars 2007, il y a donc à peine trois jours, le monde célébrait la journée internationale de la femme. Nous nous réjouissons de certaines avancées significatives en matière d’application des droits fondamentaux de la femme, mais cependant, nous devons par la même occasion reconnaître qu’elle souffre jusqu’à ce jour de beaucoup de préjugés et de maltraitances qui sont par ailleurs considérés par la majorité des hommes comme tabous.

Des exemples de femmes qui ont réussi ne sont plus à compter. Elles sont présidentes de la république, chefs de gouvernement, ministres, députés, scientifiques, ingénieurs, pilotes, techniciennes, chef d’entreprises, etc.
En revanche, elles font aussi l’objet de violences en tout genre. C’est le cas des opposantes aux régimes despotiques telle que Maître Marie-Thérèse Nlandu, arrêtée en période électorale sans aucune explication qui tienne debout par le pouvoir hitlérien de Joseph Kanambe.

Maître Nlandu est entrain de moisir dans les enfers carcéraux de Kinshasa dans des conditions complètement humaines, sans que l’on lui accorde le droit d’entrer en contact avec les membres de sa famille ni ses collaborateurs politiques. L’entretien avec ses avocats est aussi un vrai combat titanesque. Pour une juriste de renom international, ce calvaire doit être insupportable. Rester sous les verrous, sans possibilité de se défendre.

Pendant que Armand de Decker s’enorgueillit de relancer une pseudo coopération structurelle entre son pays la Belgique et le Congo, une femme est oubliée en bagne pour n’avoir violer aucune loi de la république. Pour les politiques belges, c’est normal. Les autorités belges passent leur temps à distraire l’opinion internationale et les Congolais en leur faisant croire qu’elles s’intéressent à leur sort. Faux !!! Au lieu de demander que l’on fasse la lumière sur l’arrestation injustifiée de Me Nlandu, elles préfèrent recevoir Miss Congo qui ne représente absolument rien en terme de développement ni personnel, ni social, ni politique. Qu’ils sont festivalesques ces Belges.

Je demande personnellement à tous les Congolais, en particulier aux membres de l’opposition politique ou armée (en l’occurrence toute la famille UN – Union pour la Nation – soutenue par Jean-Pierre Bemba, l’UDPS…), la société civile congolaise, les Congolais de l’étranger, les habitants de Kinshasa et du Bas-Congo en particulier, de se constituer partie civile contre l’incarcération de Me Nlandu. Elle a lutté pour notre liberté en exprimant ses opinions, en retour, soyons reconnaissants en réclamant ouvertement sa libération. L’opposition est priée de bouger au lieu de dormir sur ses lauriers.


Le Congo a aussi son Aung San Suu Kyi qui mérite autant de considération et de mobilisation que l'emblématique révolutionnaire birmane, toujours en détention. La Belgique ne bouge pas le petit doigt, trop compromise dans les excès de leur poupon Joseph Kanambe (dit Kabila), étant que c'est elle qui l'a placé contre la volonté du peuple au sommet de l'Etat en fomentant des élections bardées d'irrégularités inimaginables. Et dire qu'elle a vécu sur la terre du roi Albert II durant plusieurs années, ses enfants y vivent encore, mais leurs voix sont étouffées par les autorités belges.



C’est pas nous qui ferons courber Joseph l’imposteur, mais la vérité et la détermination à la faire valoir.


C’est pas nous qui ferons courber Joseph l’imposteur, mais la vérité et la détermination à la faire valoir.

Freddy Tshiamala
Critique poltique

Armand De Decker veut fossoyer les maigres économies du Congo au nom de la Belgique



Par Jean-Pierre Mbelu

Qu’entend-on par bailleurs de fonds ? La définition théorique qu’en donne Colette Braeckman en fait « les plus importants donateurs » de fonds au Congo, « désireux d’encourager au plus vite la reconstruction » (Le Carnet de C. Braeckman : Les bailleurs au chevet du Congo, dans Congoforum du 10/03/2007). Dans ce petit billet, « la spécialiste belge du Congo » cite la Coopération belge au développement, le Fonds européen de développement, la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International. Ce dernier est accusé par Colette d’avoir été trop sévère quand sa mission diligentée dernièrement au Congo a relevé que le déficit budgétaire avait atteint 120 millions de dollars en janvier et février. Parmi ces « donateurs », deux sortent du lot dans la mesure où ils estiment que « les dons » faits au Congo pour sa reconstruction ne doivent être soumis à aucune « conditionnalité ». Il s’agit du Ministre belge de la Coopération et du Commissaire européen au développement, tous deux libéraux wallons.
Sur un autre registre, le CADTM, dans un communiqué de presse dénonçant « l’enrichissement exponentiel de quelques-uns » définit pragmatiquement les bailleurs de fonds comme étant les fossoyeurs des économies du Sud par l’imposition d’un modèle économique « incapable de prendre en compte l’intérêt du plus grand nombre. » (Communiqué de presse. Le CADTM dénonce l’enrichissement exponentiel de quelques-uns alors que les droits fondamentaux de milliards de personnes ne sont pas garantis, dans
www.cadtm.org du 10/03/2007). Pour ce Comité pour l’annulation de la dette du tiers-monde, « le FMI, la Banque mondiale, les dirigeants des pays industrialisés, les grandes entreprises multinationales sont les défenseurs de ce système structurellement inique, qui vise à accroître sans fin les profits réalisés par quelques-uns, et ce avec la complicité des élites des pays du Sud. » (Ibidem). Le CADTM en arrive à cette conclusion après avoir examiné, de près, « les dons-dettes » offerts au Pays du Sud depuis des années et constituant pour eux « une dette odieuse dont les populations n’ont pas profité». Ces « dons-dettes » sont un investissement pour les classes possédantes du Nord eu égard aux intérêts qu’ils produisent. Si ces intérêts rendent les riches des pays industrialisés plus riches –selon le magazine Forbes, ils sont passés de 793 milliardaires l’an dernier à 964 cette année-ci-, leur remboursement au titre de service de la dette ne permet pas aux populations du Sud de répondre à leurs besoins humains fondamentaux. Si « la fortune cumulée de ces 946 milliardaires s’élève à 3.500 milliards de dollars », elle n’a aucune commune mesure avec la dette extérieure publique de tous les pays en développement (1.500 milliards de dollars).
Quand la reconstruction de notre pays est évoquée comme raison suffisante pour que « les dons-dettes » à lui offrir soient sans « conditionnalité », cela fait sourire. L’évocation de la reconstruction du pays est un attrape-nigaud. Ce n’est pas parce qu’elle constitue une urgence. Poser certaines conditionnalités peut être suicidaire pour les réseaux d’élite opérant au Nord comme au Sud pour l’enrichissement sans cause des classes possédantes. Les conditionnalités pourraient saper les bases de la prédation sur lesquelles repose l’économie néolibérale dont les paradis fiscaux, les politiques d’ajustement structurel et la non-imposition d’un impôt exceptionnel sur les grosses fortunes.
A supposer qu’un audit soit diligenté en bonne et due forme sur les 120 millions de dollars de déficit budgétaire du Congo constaté en janvier et février, il ne serait pas étonnant que des pans entiers des réseaux d’élite auxquels participent certains compatriotes au pouvoir tombent. Qui se risquerait sur ce terrain ? Personne.
Il est rigolo que « la bonne gouvernance » soit évoquée comme conditionnalité pour les dettes à imposer au Congo. Que signifie-t-elle ? Rien d’autre que la mise en pratique des politiques d’ajustement structurel dont la libéralisation, les privatisations, la réduction des budgets sociaux. Qu’un Ministre belge affirme que « la bonne gouvernance est un processus, et non un préalable » pour la Coopération, cela veut dire que l’intégration du Congo dans l’économie mondialisée de la prédation va se faire lentement mais sûrement. Les premiers signaux ont été donnés avec la signature des contrats léonins, la vente des carrés miniers, les ventes de nos villages faisant de nos frères et sœurs des « sans terre », etc.
Il est plus que temps pour que les Congolais(es) se détournent des « petites mains médiatiques » nationaux et internationaux et travaillent assidûment avec les « médias alternatifs » et les associations de la société civile (du Sud et du Nord) comme CADTM ou Dialogue des Peuples. Ils pourront, ensemble, comme à tâtons, travailler à donner une autre orientation à la politique économique du Congo et à celle du monde. A ce point nommé, CADTM propose « quatre mesures destinées à ouvrir une voie radicalement différentes :
-l’annulation totale et immédiate de la dette extérieure publique de tous les pays en développement et un audit dans chaque pays pointant les différentes responsabilités dans la situation actuelle ;
-l’abandon des politiques d’ajustement structurel (…) que les grandes puissances parviennent à imposer grâce au mécanisme de la dette ;
-la suppression des paradis fiscaux et l’expropriation des sommes qui y sont dissimulées ;
-enfin, un impôt exceptionnel de 50% sur la fortune des 946 milliardaires répertoriés par Forbes (…) » (Ibidem)
Malheureusement, ce n’est pas par cette voie que « les bailleurs viennent au chevet du Congo ». Ceux-ci veulent mentir aux Congolais(es) en touchant leurs cordes sensibles par l’évocation de l’urgente reconstruction du pays afin qu’après leur avoir jeté de la poudre aux yeux, ils les maintiennt ad vitam aeternam sous leur domination. Les Congolais(es) finiront-ils (elles) par être plusieurs millions à comprendre et à déjouer ce mécanisme suicidaire ?
CongoOne , Mise en ligne le 10-03-07

L'Etat Belge et l'Occident tout entier souhaitent balkaniser le Grand Congo

Ex-République démocratique du Congo
Par Philippe Liondjo

Ainsi donc, voici que notre territoire se réduit comme peau de chagrin et fond comme neige au soleil. Au rythme ou nous allons, dans deux ans les livres et autres atlas géographiques spécifieront que la taille de la R.D. Congo est de 1 million de kilomètres carrés en lieu et place des quelques 2 millions 345 milles 510 Km2 actuels.
Et nos enfants apprendront à l’école que ce pays est composé des provinces de Kinshasa, Equateur, Kasaï Occidental et Oriental. Les autres provinces et régions auront été rétrocédées à leurs prétendus propriétaires originels, à savoir le Bas-Congo et les trois quart sud du Bandundu à l’Angola, Les deux Kivu au Rwanda, la Province Orientale et le Maniema à l’Ouganda et enfin le Katanga à la Zambie et à la Tanzanie. Et ces hauts faits seront mis au crédit du grand pacificateur, le Doctor Honoris Causa et très démocratiquement élu Président de la République. Et on nous bassinera avec des louanges dithyrambiques le décrivant comme l’espoir du Congo !
Mais au fait, n’est-ce pas dans la Constitution de notre pays qu’il y a ce fameux article 217 qui explique tout ce qui se passe en ce moment ? Cet article stipule ce qui suit :
La République Démocratique du Congo peut conclure des traités ou des accords d’association ou de communauté comportant un abandon partiel de souveraineté en vue de promouvoir l’unité africaine.
Donc, pour ne pas déstabiliser la région et dans le seul souci de promouvoir l’unité africaine, nous en sommes là, cédant des pans entiers du territoire national.
Les langues de vipère et les esprits tordus qui ont pensé que des pays amis comme l’Angola ne cherchaient pas une rétribution de leurs efforts et de leurs sacrifices pour être spontanément venu en aide aux libérateurs afdéliens, en sont pour leurs frais. Et si nous persistons à douter à haute voix, nous allons encore une fois passer pour d’éternels rouspéteurs et de «reculeurs impénitents». On va nous dire que nous ne sommes pas pour la démocratie et que nous rêvons de voir revenir les sombres jours de la dictature Mobutu.
Balivernes !
Notre patrie est encore et toujours le théâtre d’une tragédie qui n’en finit pas et si le chef de la cours a réellement sifflé la fin de la récréation, alors quand allons-nous voir enfin les élèves rentrer dans les classes et se mettre au travail ?
Pour l’heure, c’est pire que ce que nous avons toujours connu. Et chaque jour qui passe nous entraîne de plus en plus au fond du trou. Ceux qui croyaient que nous étions en passe de sortir du gouffre doivent déchanter aujourd’hui car la vérité est que les abîmes de l’enfer viennent à peine de s’ouvrir sous nos pieds et nous y plongeons à vitesse accélérée. Certains avaient prédits cette balkanisation, ce dépeçage en règle de notre pays, mais eux aussi furent qualifiés de tous les noms. Et je me demande pour qui cela fut pire : Ceux de la diaspora, qui ont été traité d’antipatriotiques et de non-congolais et exclus du processus électoral, ou ceux qui, vivant au pays, ont été arrêtés, emprisonnés, torturés, assassinés par la très démocratique Police National (dont la composition est à géométrie très floue) ou les Services de l’ANR (très forte dans le renseignement sur les opposants congolais, mais nullissime lorsqu’il s’agit de prévenir toute agression extérieure) ?
Je ne sais pas, mais on peut dire sans verser dans le pessimisme et la «critiquologie aigue» que les agissements des politichiens et du gouvernement actuel du Congo nous mènent droit vers la désintégration de la République telle que Lumumba nous l’a laissé un certain 17 janvier 1961.
Très bientôt, certains congolais du Bandundu vont devenir des angolais, d’autres dans les Kivu seront des rwandais de nationalité et je me demande quand est-ce que Sassou va venir réclamer que lui soient rendues les terres des Batéké qui ont été volées à son pays.
Et quand est-ce que nous devrons rétrocéder le Nord à la Centre Afrique ?
Eh oui ! L’Angola vient d’ouvrir la voie en clamant que les frontières n’étaient pas justes et que son intrusion sur notre territoire n’est en rien une violation de l’intégrité physique de notre pays, mais simplement un juste retour à la normale.
Je vous salue peuple de l’ex-République Démocratique du Congo.


CongoOne , Mise en ligne le 09-03-07

Colette Braeckman : la colonisatrice belge aux dents de scie



Par Jean-Pierre Mbelu

Il sera toujours intéressant de lire « la spécialiste belge du Congo » au journal le Soir. Dans ses derniers Carnets, elle est restée égale à elle-même ; c’est-à-dire incapable de déceler les contradictions émaillant les relations historiques entre la Belgique et le Congo ; lesquelles contradictions font dire à plus d’un(e) Congolais(e) que la politique de la Belgique à l’endroit du Congo est fondée beaucoup plus sur « la charité bien ordonnée » commençant par soi-même que sur toutes les bonnes et belles intentions clamées sur les toits.
Traitant de la première réunion mixte ayant eu lieu « dans une salle surchauffée du ministère congolais des Affaires étrangères » entre les partenaires belges et congolais (depuis 1990) en vue de relancer la coopération au développement entre les deux pays, Colette Baeckman informe que « c’est à la suite du massacre des étudiants sur le campus de l’Université de Lubumbashi que la Belgique avait suspendu sa coopération avec le Zaïre du président Mobutu, ce dernier ayant refusé la mise sur pied d’une commission d’enquête réclamée par Bruxelles. » (Le Carnet de C. Braeckman : Belgique Congo. Première réunion de commission mixte depuis 1990, dans Congoforum du 09/03/2007). Pour Colette Braeckman, « ce départ des Belges, qui évacuèrent d’un même élan coopération civile et militaire, est souvent considéré comme le début de la descente aux enfers d’un régime qui ensuite abandonné par tous les occidentaux. (…) Cette politique d’abandon, destinée à faire fléchir le dictateur eut des conséquences dramatiques pour les populations civiles et acheva de ruiner les infrastructures du pays. » (Ibidem). Relisons Colette.
Si elle attribue la rupture de la coopération belgo-congolaise à la dictature de Mobutu, elle estime que c’est le retrait des belges et des autres Occidentaux du Congo qui a eu « des conséquences dramatiques pour les populations civiles et acheva de ruiner les infrastructures du pays. » (Ibidem). Donc, pour « sauver les populations civiles », il est important de tourner ces pages sombres de l’histoire. Dans cette optique, rappelle Armand De Decker cité par notre auteur, « la Belgique entend désormais reconstruire des relations structurelles avec le Congo, saluer les efforts déployés par le peuple congolais au cours de cette transition qui a abouti aux élections (dites) démocratiques, aider le pays à relever le défi gigantesque du développement. » (Ibidem).
I. Une politique de deux poids deux mesures
Ce que ce texte ne dit pas est que d’autres massacres pires que ceux de l’Université de Lubumbashi (non élucidés jusqu’à ce jour) ont eu lieu après Mobutu et n’ont poussé Bruxelles à réclamer une commission d’enquête ni à rompre la coopération avec leurs commanditaires. Pour preuve, «la Belgique, depuis 1999, débourse chaque année plus de 50 millions d’euros » (Ibidem) pour le Congo. Et aucune enquête n’a été initiée par Bruxelles ni pour les plus de 4 millions de Congolais(es) mort(e)s pendant la guerre d’agression rwando-burundo-ougandaise, ni pour les récents massacres du Bas-Congo. Pourquoi cette politique de deux poids deux mesures ? La mondialisation marchande aidant, le Congo est redevenu un vaste marché des ressources du sol et du sous-sol permettant aux multinationales occidentales de faire des affaires juteuses et de conserver leurs avoirs dans les banques des pays-mères. Les valeurs marchandes ayant supplantée toutes les autres valeurs humaines (de la sauvegarde de la vie, de la protection des droits humains, de la respectabilité et de la dignité), il aurait été ringard que Bruxelles cherche à marcher à contre-courant des prédateurs du monde. Fondés sur la compétitivité et la concurrence, les pays occidentaux dont la Belgique n’ont pas voulu laisser le marché congolais aux mains des Asiatiques et des Britanniques pour prendre le temps d’en savoir un peu plus sur « le génocide oublié » des Congolais(e)s, le déni des droits humains, les arrestations arbitraires, la corruption, etc. Désormais, ils voudraient se garder de toute ingérence dans les affaires intérieures de leur pays « ami », du moment que le nombre élevé de cadavres ne constitue pas un handicap pour les affaires de différents réseaux d’élite !Dans la grande lutte compétitive, il faut éviter d’être aux oubliés absents. Colette le souligne sans ambages quand elle écrit : « Même si les Britanniques, qui privilégient l’aide multilatérale, sont aujourd’hui les premiers bailleurs de fonds du Congo, les Belges occupent une place privilégiée » (Ibidem). Pour rien au monde, cette place ne doit être perdue ! Au nom de la concurrence, le mimétisme a conquis les cœurs et les esprits des défenseurs des droits humains ! Le monde à l’envers !
II. Le « retour de l’histoire » ou de l’Etat tutélaire ?
Et « retour de l’histoire » dont parle Colette Braeckman, c’est la reprise de la Belgique de sa place d’avant les indépendances d’ « Etat tutélaire » au Congo. Toute la rhétorique de l’aide au développement n’a rien à voir avec les faits. La Belgique est au Congo depuis plus de cent ans. Ses va-et-vient dans ce pays n’en ont pas fait un pays « en voie de développement ». Qu’elle soit à l’affût des « hommes nouveaux » refusant « la rupture avec le passé colonial » (Le Carnet de Colette Braeckman : Antoine Gizenga ou le retour de l’histoire, dans Congoforum du 09/03/2007), cela pourrait l’aider à perpétuer la politique infantilisante de « la main tendue » prônée par « le pseudo-révolutionnaire » Gizenga, indispensable à l’enrichissement des classes possédantes du Nord et de leurs valets du Sud, au grand dam des peuples du Sud et du Nord.
« Le retour de l’histoire des lieux » et le « refus de la rupture avec le passé colonial » serviront beaucoup plus la Belgique que le Congo. Pour cause. Les acteurs politiques du Congo exécutent des politiques économiques concoctées ailleurs, dans les bureaux climatisés de Washington, Londres, Bruxelles et Paris. Leur exécution demande que le Congo soit placé face à des alternatives infernales comme celles lisibles dans l’article de Guy De Boeck intitulé « Charité bien ordonnée… »,quand l’auteur cherche une issue entre les « attentistes » et les « fonceurs » belges en matière de coopération avec le Congo. Pour Guy De Boeck, « il va de soi que si le Congo ne reçoit ni aide ni appui (…), il restera faible, impuissant, donc à la merci des prédateurs internationaux, et de leurs relais congolais. Faute de moyens pour faire face à des besoins vitaux et devant se les procurer à tout prix, il n’aura d’autre choix que de brader ses richesses. » (Charité bien ordonnée…, dans Congoforum du 06/03/2007). Et les Belges pouvant profiter de cette situation, selon Guy De Boeck, sont les « attentistes flamands ». Pourquoi et comment ? « Les contrats léonins, on le sait, portent sur des produits minéraux. Parmi ceux-ci il y a notamment les diamants, pour lesquels une des grandes places internationales est à Anvers. Dans le domaine des métaux non ferreux, d’autre part, la seule société d’envergure, en Belgique, est la Métallurgie Hoboken Overpelt. » (Ibidem). Cette analyse pousse Guy De Boeck à douter des intentions démocratiques des « attentistes flamands ».Il note : « On est, dès lors amené à se demander si un certain « attentisme » est vraiment basé uniquement sur des conceptions exigeantes de démocratie et de bonne gouvernance ! » (Ibidem). Pour lui, « les fonceurs wallons » trouvent des « convergences des plus curieuses entre les grands principes politiques et un certain nombre d’intérêts immédiats. » (Ibidem). Il s’explique. « Un Congo capable de payer ses factures serait un client de rêve pour une région qui produit des rails, du fer à béton, du matériel de chemin de fer, tout ce qui relève de la construction métallique et du génie civil…Encore qu’il y ait quelques entreprises de ce genre en Flandre, c’est en Wallonie que se situe le gros du bataillon dans ce domaine. Il faut ajouter que la Wallonie pourrait fournir non seulement des machines, mais l’encadrement, les francophones pouvant être immédiatement opérationnels au Congo. » (Ibidem). Ou bien le Congo choisit « l’attentisme » et il continue de sombre dans le chaos en étant la proie facile de tous les prédateurs internationaux, ou bien il accepte de se faire « aider » et les « fonceurs wallons » trouvent leurs parts de marché. Pourquoi le Congo doit-il choisir entre le chaos et l’aide truquée ?
Cette « alternative infernale » fait comme si le Congo en particulier (et le Sud en général) a jamais été « aidé » par le Nord (en dehors de quelques activités caritatives !). Il est de plus en plus prouvé que les capitaux partent du Sud vers le Nord et non l’inverse. (Lire notre article intitulé Programme du gouvernement Gizenga. Essai de décorticage (suite et fin)).Aussi est-il de notoriété publique qu’il n’y a pas du tout d’aide. Ce sont ou des dettes à rembourser avec des intérêts faramineux ou un marché asymétrique où les prix sont fixés unilatéralement par les classes possédantes des pays industrialisés et leurs multinationales. Lui-même, Guy De Boeck, dans un article intitulé « Qui paie ses dettes… », invitait la Belgique à commencer par payer ses dettes à l’endroit du Congo et à s’acquitter des indemnités liées au travail forcé et au génocide léopoldien pendant la période de l’exploitation du caoutchouc ! Il est de plus en plus prouvé que « si les capitaux privés ne s’investissent pas dans le continent noir, le remboursement sans fin de la dette extérieure constitue un véritable rançonnement. Selon ses propres chiffres de la Banque mondiale, l’Afrique a déjà remboursé près de quatre fois sa dette de 1980 mais se trouve trois fois plus endettée. » (A.-C. ROBERT, L’Afrique au secours de l’Occident, Paris, Editions de l’Atelier, 2004, p.40). Et tous les programmes initiés anarchiquement dans ce continent (comme celui que le Belgique voudrait inviter le Congo à respecter, le DSPRP) pour combattre « la pauvreté » ont été une lutte engagée contre les « appauvris » et la fabrication de leurs lieux de résistance. En effet, « la lutte contre la pauvreté est sensée être cohérente avec le phagocytage de la puissance publique, les privatisations, la réductions des budgets publics y compris d’éducation et de santé, qui sont consubstantiels des politiques libérales ou l’action de l’Etat dont être « rationalisée » et conforme à la bonne « gouvernance ». (Ibidem, p.42-43).(A leur dernier passage au Congo, les experts du FMI n’ont-ils pas invité le gouvernement à restreindre les dépenses publiques ?) Ce concept rabâché à temps et à contretemps par les oligarques congolais et leurs parrains est confondu avec l’idée d’une gestion claire, démocratique et transparente de la chose publique. Et pourtant, il n’en est pas question : « la gouvernance est en réalité un concept idéologique issu de la science administrative anglo-saxonne. Il vise à reproduire le modèle libéral de société et de gouvernement : Etat faible cantonné à ses fonctions régaliennes, libre jeu du marché et de la société civile assumant les fonctions caritatives au lieu et place de la puissance publique. » (Ibidem, p. 43. Nous soulignons). Le fonctionnement d’un tel système dépend des soutiens que lui offrent les Institutions Financières (dites) Internationales et les organisations non gouvernementales (ONG). Ressasser la thématique de la pauvreté permet à un certain Occident (des « petites mains du capital ») de garder sa situation de surplomb. C’est-à-dire que « l’Occident se met encore (et toujours) en position de formuler à la fois les questions et les réponses, et de désigner autrui, de lui donner un nom. Dans cette logique, les bailleurs de fonds comme les ONG participent à une domination politique et symbolique qui prive l’autre de sa parole et de la possibilité de dire « je ». Elle fait disparaître l’autre, parle en son nom et maintient l’Occident dans le rôle de détenteur des vérités, de reconnaissance sociale, de la vie et de la mort. » (Ibidem, p.44).
Fort de cette position de domination, cet Occident feint de se solidariser avec ceux et celles qu’il ne fait qu’appauvrir. Donc, « sous les apparences de solidarité, le discours contre la pauvreté vise non seulement à maintenir une logique d’assistance mais à conforter le système capitaliste de domination. L’échec de la lutte contre la misère apparaît donc d’abord comme celui de l’Occident et de sa vision du monde. » (Ibidem, p.44-45). La reconduction du DSPRP (Document de la stratégie pour la réduction de la pauvreté au Congo) est un poison. Elle participe d’une vision économiciste du monde, aux antipodes de celle où le Calculemus, aujourd’hui réduit au libre jeu du marché, est un art de négocier les biens, les services et les idées. Le Congo et ses dignes filles et fils sauront-ils, dans les jours et années à venir, travailler à la fabrication et/ou à la reconquête d’une autre vision (ou d’autres visions) du monde, de l’homme et des choses pour asseoir leur bonheur partagé sur autre chose que la vision marchande du monde et l’assistantialisme ne profitant qu’aux oligarques prédateurs et leurs parrains ? C’est cet assistantialisme au pouvoir ensorceleur que servent souvent les concepts du genre « DSPRP », « bonne gouvernance », « aide », « coopération », etc.
Il est un peu inquiétant qu’un certain journalisme se situant en marge de l’histoire et du champ de la fabrication capitaliste des procédures de prédation et de domination, des concepts et expressions ensorceleurs occupe une place de choix dans nos différents espaces publics. N’empêche qu’il soit régulièrement débusqué et mis à l’épreuve. Telle est l’une des tâches urgentes des « empêcheurs de penser en rond », des « ascètes du provisoire » et des autres « veilleurs-protecteurs » de la mémoire historique de nos populations.
CongoOne , Mise en ligne le 09-03-07