L'ONU enquête sur des "trafics présumés" d'or et d'armes impliquant des Casques bleus déployés en 2005 en Ituri, dans le nord-est de la République démocratique du Congo (RDC), a annoncé mercredi la Mission de l'ONU en RDC (Monuc).
"Dès que des allégations sérieuses ont été portées à son attention en 2006, la Monuc (...) a immédiatement demandé que soit menée une enquête par le Bureau des services de contrôle interne (BSCI) des Nations unies", basé à Nairobi, selon un communiqué diffusé à Kinshasa.
"Une enquête complète a été lancée, indépendamment de la Monuc, par le BSCI" et était "toujours en cours" en mai 2007, a précisé le porte-parole de la Monuc Kemal Saïki lors d'un point presse.
L'annonce officielle de cette enquête intervient après la publication par la BBC d'un reportage faisant état de l'implication présumée de Casques bleus du contingent pakistanais dans un trafic d'or et d'armes avec des miliciens du Front nationaliste et intégrationniste (FNI), un des cinq groupes armés alors actifs en Ituri.
La BBC affirme que le trafic a débuté en 2005 et cite des témoins de tractations entre d'une part des Casques bleus pakistanais et d'autre part des négociants locaux et des miliciens du FNI, en particulier les commandants "Kung-fu" et "Dragon", à Mongwalu, un site aurifère de l'Ituri.
La BBC fait notamment état du témoignage aux enquêteurs du BSCI d'un officier congolais engagé dans les désarmement des milices à Nizi, localité voisine de Mongwalu.
Cet officier "a révélé que les armes données par les ex-combattants leur étaient rendues en secret par le major Zanfar (commandant des Casques bleus à Mongwalu), compromettant ainsi le travail effectué".
Selon un responsable onusien à Kinshasa, le chef de la Monuc, William Swing, a nié auprès de la BBC "être au courant d'allégations concernant des trafics d'armes".
"Nous avons fait exactement l'opposé. Nous avons démobilisé plus de 20.000 (miliciens). Nous avons brûlé en public ces armes. Il n'y a absolument rien derrière ces allégations", a déclaré à la BBC M. Swing.
En octobre 2005, une journaliste de l'AFP avait rencontré à Mongwalu des responsables du contingent pakistanais, déployés sur cette zone depuis le mois d'avril, alors qu'une vaste opération de reprise de contrôle des mines d'or d'Ituri était engagée par l'armée congolaise, avec l'appui de la Monuc.
Plusieurs villages proches de Mongwalu venaient de subir une attaque de miliciens, qui étaient progressivement chassés de cette zone. Les Casques bleus pakistanais collaboraient alors ouvertement avec certains chefs miliciens du FNI, qui avaient opté pour la démobilisation.
Le major pakistanais Mohammed Javed avait déclaré à l'AFP avoir arrêté 17 personnes responsables des récentes attaques contre des civils "grâce à l'aide des commandants +Kung-fu+ et +Dragon+".
Ces deux miliciens, qui avaient longtemps contrôlé les mines d'or de la région, étaient accueillis en alliés au camp de la Monuc de Mongwalu.
Fin 2005, la justice militaire congolaise a lancé des mandats d'arrêt pour "crimes de guerre" contre ces deux chefs miliciens et l'un d'eux, Kung-fu, avait été arrêté.
"Les Casques bleus visés par l'enquête ont quitté la RDC il y a plusieurs mois. L'enquête se poursuit, mais promet d'être longue et difficile", a déclaré à l'AFP un responsable de l'ONU à Kinshasa.
De son côté, la porte-parole du ministère pakistanais des Affaires étrangères, Tasnim Aslam, a déclaré mercredi à la presse que l'ONU avait informé son pays de cette enquête, indiquant "qu'à ce qu'à ce stade, il s'agissait de simples allégations, qui devaient être creuser".
"De notre côté, a-t-elle ajouté, les autorités compétentes vont examiner cette question pour établir les faits".
CongoOne , Mise en ligne le 23-05-07